Jeudi 8 mai, un soleil inattendu éclairait chaleureusement la place du Château, où un public attentif s’était rassemblé pour célébrer la victoire de 1945 contre le nazisme et le fascisme. La cérémonie a débuté par un discours de madame le maire, suivi de la lecture du message du ministre des Armées. La Marseillaise a retenti, suivie du dépôt de gerbe au monument aux morts et d’une minute de silence en mémoire des disparus. La musique du Chœur de Zinc a apporté une touche de douceur à cette matinée. Pour clore cet hommage, un apéritif d’honneur, offert par les nouveaux gérantˑes du Ch’ti Castel, a permis aux participants de se retrouver dans une atmosphère de partage et de fraternité : de beaux moments d’émotion, de réflexion, de partage… et d’espoir.

Discours de Madame le Maire, Monique Giraud-Lazarri – Cérémonie du 8 mai 2025
Madame la Conseillère départementale,
Mesdames et Messieurs les conseillers et conseillères municipales,
Mesdames, Messieurs,
Coaraziens, Coaraziennes,
Merci d’être présents et présentes à cette cérémonie du 8 mai pour rendre hommage aux Coaraziens et Coaraziennes morts au combat, qu’ils ou elles soient soldats, résistants ou civils.
Il y a 80 ans, l’acte de capitulation fixe la cessation des hostilités entre les commandements militaires allemands du 3e Reich et les Alliés.
Ce jour de victoire a marqué la fin de la plupart des combats en Europe.
Message du président des États-Unis, Harry Truman, en ce jour de victoire :
« Notre joie est tempérée et atténuée par la conscience profonde du prix terrible que nous avons payé pour débarrasser le monde d’Hitler et de sa bande maléfique.
N’oublions pas, chers compatriotes américains, la tristesse et le chagrin qui habitent aujourd’hui les foyers de tant de nos voisins – des voisins dont le bien le plus précieux a été sacrifié pour sauver notre liberté. 250 000 morts. »
Ce champ de bataille à la dimension mondiale, cette scène macabre où des dizaines de millions de militaires et de civils ont été tués (dont près de 6 millions de Juifs), nous ont-ils ouverts des horizons plus humains ?
Nous ont-ils ouverts les frontières de la liberté, de l’égalité, de la fraternité, de la solidarité ?
80 ans après, la situation est amère :
-
Des murs se construisent, les États s’isolent, les guerres se multiplient.
-
Les nationalistes, les fascistes prennent le pouvoir – ou plus exactement les citoyens leur donnent le pouvoir.
-
Les institutions sont bafouées.
-
Le pouvoir des technologies alliées aux très grandes fortunes règne en maître sur le monde de manière insidieuse.
-
Le faux devient vérité…
Il y a les gagnants et les perdants : tant pis pour eux !
Ce n’est plus un champ de bataille, c’est la jungle.
La force l’emporte sur la raison, la peur sur le raisonnement, la violence sur l’humanité.
La Justice elle-même est attaquée, ce qui remet en cause l’ensemble du système démocratique.
« Ce n’est pas nouveau, la droite et l’extrême droite ne supporte pas d’être mises en cause.
Ceux-là même qui veulent une justice extrêmement dure considèrent qu’ils sont au-dessus des lois, piliers contre la violence quelle qu’elle soit, émanation de nos règles et garants du droit. »
— Romain Jeanticou
La justice et la presse (la vraie) sont dans le viseur (quelquefois réel) des partis et des gens de pouvoir, car ils gênent, dérangent et accusent.
Ce qui était impensable devient réalité :
on condamne la corruption, mais on vote quand même pour des corrompus.
Les intérêts personnels passent avant le jugement moral. Opportunisme d’abord !
Les exigences morales pour accéder à de hautes fonctions n’ont cessé d’être rabaissées :
au placard la démission des gouvernants impliqués dans des affaires !
80 ans après, les démocraties n’ont jamais été aussi fragilisées.
Si l’on passe en revue les très nombreuses causes de la guerre de 39-45, trois passions humaines restent au cœur des conflits passés et présents :
-
Le désir, cupide, d’acquérir ce que l’autre a (l’expansion territoriale des États les plus puissants sur d’autres plus faibles).
-
Le désir de conserver ce que j’ai, qui entraîne une peur de l’autre, une peur de l’agression.
-
Le désir, vaniteux, de “reconnaissance”.
Sur ces désirs viennent se greffer les décisions politiques, économiques, sociales, sociétales, idéologiques :
-
Le traité de Versailles.
-
Les alliances fluctuantes entre les Alliés.
-
Les conséquences sociales de la crise de 29.
-
Les politiques d’armement comme sortie de crise.
-
La volonté d’expansion de certains pays.
-
L’irrédentisme.
-
Le rôle des idéologies raciales.
Eugène Ionesco, dans sa pièce Rhinocéros, créée en 1959, dénonce le fascisme, la lâcheté et l’opportunisme dont ont fait preuve des gens par ailleurs intelligents et raisonnables.
Quelle similitude entre hier et aujourd’hui !
Ce ne sont certes que mes réflexions, mais c’est troublant.
Il suffit de changer les noms des pays, les noms des peuples martyrs…
Gazaouis, entre autres.
Est-ce vraiment une victoire que nous célébrons ?
Nous nous sommes débarrassés en 1945 de la plus terrible des oppressions, celle que tentaient d’imposer au monde entier les régimes nazi et fascistes.
Et nous sommes ici pour rendre hommage à celles et ceux qui ont donné leurs vies pour notre liberté, qu’ils pensaient avoir définitivement sauvée.
Est-ce vraiment le cas ?
Car :
-
S’affranchir des droits sociaux, fiscaux, voire simplement humains ;
-
Gouverner les États comme des entreprises ;
-
N’obéir qu’aux seules lois de l’accumulation du capital ;
Voilà des actions clés d’un capitalisme sans foi ni loi, dont les valeurs fondamentales peuvent se résumer ainsi :
Ils ont franchi la frontière de l’inconcevable !
La cible de cette idéologie-là, de plus en plus influente, n’est autre que la démocratie.
Dans nos pays “libres”, une guerre insidieuse est en cours.
D’un côté les politiciens adeptes d’une bureaucratie excessive.
De l’autre les assistés, vivant soi-disant « au crochet de la société ».
Et au milieu, les entrepreneurs innovants associés aux ultrariches.
Ces « maîtres du monde » promettent une forme de perfection – supposée – en toutes choses grâce à l’IA.
Mais l’IA a constamment faim de minerais, d’eau et d’énergie.
Elle est donc source de conflits, de domination, d’expansion territoriale, de bataille pour les ressources, et de menaces sur les objectifs climatiques.
Voilà où nous en sommes, 80 ans après.
Quelles solutions à ce marasme ambiant ?
Je ne vous cacherai pas que je ne les ai pas.
Mais elles sont à trouver en faisant appel :
-
à notre intelligence d’humains (l’IA n’est qu’un outil) ;
-
à nos manières d’être en commun ;
-
à notre attachement à la vraie vie ;
-
à notre mobilisation ;
-
à notre capacité de réaction ;
-
à notre refus de toute norme infondée ;
-
à notre défense de la dignité et de l’intégrité humaine.
Nous sommes imparfaites et imparfaits, certes, mais riches de notre diversité.
Il mondo è bello perché è diverso.
Parmi les conséquences positives de la guerre :
Le 21 avril 1944, le général de Gaulle signe l’ordonnance qui accorde le droit de vote aux femmes.
Le 29 avril 1945, les Françaises votent pour la première fois.
Les femmes ont obtenu ce droit après un siècle de combats :
-
Refus de payer les impôts (1880)
-
Renversement d’une urne (1908)
-
Candidatures illégales (1910)
-
Référendum sauvage (1914)
-
Fondation de La Femme nouvelle (1934)
Les inégalités et la ténacité font abattre les frontières.
Alors, en hommage à ces combattantes :
-
Inscrivez-vous sur les listes électorales ;
-
Participez aux élections ;
-
Apportez une vision complémentaire dans la gestion municipale.
En 2026, même dans les communes de moins de 1 000 habitants, la parité sera obligatoire.
Pensez-y, c’est dans moins d’un an !
Comme dans de nombreuses communes, la guerre a laissé des traces à Coaraze.
Les souvenirs sont encore vivants.
Des SS sur le CD15…
Des hommes alignés place Sainte-Catherine…
Des résistants cachés sur le Férion…
Une famille juive protégée…
Une mère à qui l’on annonce la mort de son fils…
Et là-haut, à la pointe des trois communes, dans le massif de l’Authion à 2 080 m d’altitude :
Des soldats français et italiens, le jour en surveillance, la nuit réunis autour d’une partie de cartes.
Jusqu’à l’arrivée des Allemands en 1945, et des centaines de morts.
Une anecdote surprenante, mais tellement humaine.
Voilà, je vous ai sapé un peu le moral.
Mais mieux vaut ne pas fermer les yeux sur cette société qui change à grande vitesse.
À nous de faire qu’elle change positivement, pour l’avenir de nos enfants et petits-enfants.
Vive Coaraze ! Vive la France ! Et paix sur la Terre, elle en a bien besoin.